L’invité du mois sur le blog et les réseaux sociaux d’Eveselache est pour ce mois d'avril Lauriane du compte instagram @Vagiquoi.
Notre pétillante invitée propose un contenu éducatif, inclusif et bienveillant autour de la sexualité, la santé sexuelle.
Nous nous retrouvons aujourd’hui pour l’interviewer autour d’un sujet (trop) peu connu : la vestibulodynie, une hypersensibilité douloureuse au niveau de la vulve.
Son expertise sera répartie en 2 articles de blog et un 3ème article sera le témoignane de L. ayant été atteinte de vestibulodynie pour traiter de manière complète le sujet.
Article 1 : Qu’est-ce que la vestibulodynie ? - Les conseils de @VagiQuoi
Article 2 : Comment "traiter" la vestibulodynie ? Aider et se faire aider
Article 3 : Témoignage de L. souffrant de Vestibulodynie
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Qui se cache derrière le compte @Vagiquoi ?
Team Eveselache — Hello Lauriane ! C’est un réel plaisir de te recevoir sur notre blog pour aujourd’hui faire de la sensibilisation autour d’un sujet encore peu connu, la vestibulodynie. Peux-tu te présenter et rapidement nous expliquer ton parcours ?
Hello ! J’ai 23 ans et j’ai découvert que je faisais du vaginisme à 19 ans, suite à des rapports sexuels pénétratifs quasiment impossibles et très douloureux. Au fil du parcours de soin, les mots vulvodynie et vestibulodynie se sont ajoutés.
Je tiens donc à préciser pour la suite de cet article que je suis une patiente engagée, informée, mais aucunement une professionnelle de santé.
Team Eveselache — Qu’est-ce qui t’a motivé à ouvrir ton compte Instagram et proposer des contenus conseils/éducation sur la sexualité ?
En premier lieu, l’envie est venue du constat de l’énorme errance médicale dans le domaine des douleurs intimes féminines ainsi que du tabou qui entourait ce sujet. Plus j’ai avancé dans mon activité sur les réseaux, plus ces constats sont devenus réels. Je ne compte plus le nombre de personnes qui sont venues me parler en message privé et m’ont confié des traitements et des propos venant du corps médical tout à fait odieux, injustifiés, et faisant l’impasse sur leurs douleurs.
J’ai également constaté, d’abord personnellement, qu’on se sent très seule, isolée, quand on souffre de ce type de douleurs. Ce sentiment s’est par la suite confirmé au fil d’échanges avec d’autres personnes concernées, qui étaient soulagées de voir qu’elles n’étaient pas seules.
Puis, petit à petit, l’envie a été alimentée par une passion grandissant pour le domaine de la santé intime et sexuelle, l’envie que les femmes (ou personnes à vulve si iels ne s’identifient pas en tant que femmes - cette précision s’appliquera pour le reste de l’article) comprennent ce qui leur arrive, comment leur corps fonctionne, mettre des informations concrètes et correctes à disposition, leur dire que ce n’est pas dans leur tête, que ça existe, qu’il y a des solutions.
Tout savoir sur la vestibulodynie
Team Eveselache — Peux-tu nous expliquer ce qu'est la vestibulodynie et quelles en sont les principales causes ?
La vestibulodynie est un inconfort chronique ressenti au niveau du vestibule, sans lésions visibles ni maladie neurologique cliniquement identifiable.
Je reprends les éléments clés :
- Inconfort : les douleurs ressenties peuvent varier selon les personnes, tout comme leur intensité. On peut mentionner des brûlures, des irritations, une douleur aiguë, des tiraillements, des démangeaisons, des picotements, une sensation de coupure, de chair à vif, de coup d’aiguille, etc.
- Chronique : l’inconfort dure depuis au moins 3 mois. C’est important pour différencier une vestibulodynie de simples irritations (qui ne sont bien entendu jamais souhaitables), dues à un vêtement serré par exemple, mais qui disparaîtraient rapidement et ne reviendraient pas systématiquement.
- Sans raison identifiable : un professionnel de santé ne trouve pas de lésions, de pathologie vulvaire, ou de maladie neurologique, qui pourraient expliquer ces symptômes. Cliniquement parlant, on ne voit alors rien aux examens, mais cela ne signifie pas que ces personnes n’ont rien !
- Ressenti au niveau du vestibule : il est important de préciser que le vestibule ne se résume pas uniquement à l’entrée du vagin. Il comprend également une petite partie de la vulve, à savoir la partie qui se situe entre les lèvres internes, qui peut également être douloureuse.
Une petite précision pour bien faire la différence entre différents termes : dans le cas où des douleurs sont ressenties au niveau de la vulve dans son ensemble, on parle de vulvodynie (la vestibulodynie désignant le même phénomène mais localisé au niveau du vestibule). On parle de clitoridodynie si les douleurs sont ressenties au niveau du clitoris.
Une vestibulodynie peut se manifester par des douleurs lors des pénétrations, mais aussi en dehors de tout contexte de pénétration (on peut alors citer le fait de faire du vélo, de porter un vêtement trop serré,...). Ainsi, on parle de vestibulodynie provoquée lorsque les douleurs sont en réaction à un contact (quel qu’il soit), mais je précise qu’il peut aussi exister des vestibulodynies spontanées, c’est-à-dire que les douleurs se manifestent en l’absence de tout contact (bien qu’elles soient plus rares). Il est également possible d’avoir “the best of both worlds” en ayant une vestibulodynie mixte : avec des aspects spontanés et des aspects provoqués.
De plus, la vestibulodynie peut être présente depuis toujours, depuis les premières pénétrations, les premiers contacts avec la zone (on parle alors de vestibulodynie primaire), mais aussi apparaître après une période de vie sans douleurs (on parle de vestibulodynie secondaire).
Il faut noter que la vestibulodynie est encore entourée de beaucoup de questions. C’est précisément le cas en ce qui concerne ses causes. Les professionnels de santé ont mis certains facteurs en avant, sans affirmer que ce sont les seuls possibles.
En tant que telle, la vestibulodynie implique un dérèglement du système de modulation de la douleur. En principe, la douleur est une alerte du corps qui prévient des lésions des tissus. Dans le cas de la vestibulodynie, l’information de douleur est envoyée en l’absence de lésion. Les informations envoyées au cerveau concernant la douleur sont alors déréglées et sa perception est amplifiée.
Pour citer quelques causes probables :
- des infections à répétition
- une irritation des nerfs de la vulve, qui crée alors une hypersensibilité
- une hypertonie périnéale
- une modification hormonale : par exemple en période de post-partum ou de ménopause
- On développe de plus en plus l’hypothèse selon laquelle la prise de la pilule pourrait causer ces symptômes chez certaines personnes.
- Le phénomène peut être lié à certaines pathologies/maladies comme l’endométriose, la fibromyalgie, le syndrome de la vessie douloureuse.
- Une réaction psychosomatique : tous les professionnels ne sont pas de l’avis qu’une vestibulodynie peut être en réaction à un traumatisme/événement et certains préfèrent chercher une cause plutôt physique.
Team Eveselache — Quels sont les symptômes les plus courants associés à la vestibulodynie et comment affecte-t-elle la vie quotidienne des personnes atteintes ?
Les sensations les plus souvent décrites sont celles de brûlures et de chair à vif. Elles sont le plus souvent - mais pas que - décrites à l’entrée du vagin, et également sur la partie “en bas”, entre l’entrée du vagin et les lèvres internes (partie inférieure du vestibule).
Les personnes vont alors souvent décrire des douleurs très vives lors des pénétrations ou d’autres contacts avec la zone. Une réelle problématique est alors soulevée dans le cadre de la sexualité et de nombreux impacts quotidiens sont constatés, on retrouve en particulier chez certaines personnes la peur de faire de nouvelles rencontres.
Elles vont aussi parfois exprimer une réelle gêne dans le quotidien, par exemple un besoin de réorganiser leur garde-robe, une difficulté à pratiquer certains sports, une difficulté à rester assises, cela peut même parfois aller jusqu’à les déranger dans leur sommeil.
On peut encore relater de l’impact sur les rendez-vous gynécologiques. Chez certaines personnes, une réelle peur d’avoir mal peut se développer, ce qui entraîne parfois une réticence, voire un refus de consulter, par exemple pour le check-up annuel.
Team Eveselache — Comment diagnostique-t-on la vestibulodynie ?
Lorsque l’on constate de tels symptômes, il est important d’aller consulter un professionnel de santé afin d’exclure une pathologie dermatologique, une infection, etc… comme un lichen scléreux ou une mycose par exemple. En bref, pour exclure une cause identifiable à ces douleurs.
Malheureusement, en raison de l’errance médicale, bon nombre de personnes qui consultent obtiennent un bilan clinique normal et se font renvoyer à la maison, sans réponse. Dans ces cas, il arrive que les femmes posent un mot elles-mêmes sur leurs douleurs en faisant des recherches de leur côté (Internet, réseaux sociaux,...).
Pour poser un diagnostic avec un professionnel de santé, on peut se tourner vers un.e gynécologue, sage-femme, ou encore un.e dermatologue spécialisé.e dans les pathologies vulvaires (n’hésitez pas à vous référer aux annuaires de professionnels dont je parle dans l'article 2). Il ou elle effectue le test du coton-tige, c’est-à-dire que le professionnel de santé vient frotter doucement un coton-tige sur la zone. En cas de vestibulodynie, en principe la douleur est immédiate, vive.
Si on veut aller plus loin, on mentionne que la vestibulodynie n’est pas encore un diagnostic en tant que tel. Ce terme désigne les douleurs au niveau du vestibule. En effet, “dynie” = douleur, et “vestibulo” = vestibule.
Ce terme décrit ainsi les brûlures ou autres sensations sur cette zone, mais il n’indique pas ce qui les cause précisément. Nous n’avons alors pas de réel diagnostic dans le sens où on ne peut pas dire “j’ai mal et c’est à cause de tel mécanisme”. On peut uniquement dire “j’ai une vestibulodynie”, qui décrit alors les symptômes physiques mais non le mécanisme précis à leur origine.
Bien souvent, les personnes n’auront pas de diagnostic plus précis, peut-être des hypothèses, mais sans grande certitude, car la réalité est que c’est un sujet encore complexe. Je tiens à préciser que ce n’est pas un obstacle pour aller mieux. Il est vrai que les différentes méthodes n’auront pas nécessairement la même efficacité selon l’origine précise de ces symptômes, mais cela n’empêche pas de tester différentes choses et de trouver celles qui nous correspondent.
La suite dans l'article 2 : Comment traiter la vestibulodynie . Aider et se faire Aider